Naissance de Benjamin – 7 juillet 2012

Naissance de Benjamin – 7 juillet 2012

La maison de naissance, c’est… Comme accoucher à la maison, mais sans avoir à se taper tout le ménage après. C’est accoucher en toute confiance avec des sages-femmes qui ne sont là que pour toi et ton bébé. C’est avoir toute l’attention pour toi, rien que pour toi, et hurler ta douleur sans honte. C’est pouvoir rentrer dans ton cocon, ton chez toi, dès les premières heures de bébé, sans passer de longs jours tristes et froids dans une chambre d’hôpital impersonnelle. J’ai adoré le suivi. Juste 3 sages-femmes, que tu vois en consultation en alternance, parce que personne ne peut savoir qui sera de garde le jour où bébé pointera le bout de son nez. Le tutoiement est de rigueur dès la deuxième visite : il n’y a rien à faire, ça détend. Et la consultation… Une petite pièce douillette, des fauteuils confortables, et surtout, surtout, une heure entière à papoter. De tout. De toi, de ton bébé, de ton environnement familial, du sien, de tes peurs, de ton passé, de ton homme – lequel est le bienvenu. A la maison de naissance, on ne fait pas qu’accoucher. Des tas de préparations différentes sont proposées. Pour cause d’emploi du temps déjà rempli par Mini1 et Mini2, j’ai seulement choisi la préparation ballon : des séances pour faire des étirements, faire travailler son corps en douceur dans l’optique de l’aider à mieux supporter les petits maux de la grossesse et de se préparer à l’accouchement. Le papa a aussi voulu apporter sa contribution : ensemble, nous avons suivi des séances de ballon-couple, où on apprend des positions pour accompagner les contractions et le passage de bébé (papa indispensable pour se souvenir de tout le moment venu), et une séance de préparation à la douleur. Loin du cliché de dizaines de femmes haletant de concert, il s’agit là d’apprivoiser la douleur par des mots, pour la sortir de soi, y compris le jour J. Le principe est simple : moins on a peur, moins on a mal. Cela étant, ya pas de miracle, ça douille quand même. Au final, le ballon-couple ne nous a pas servi des masses. Après des semaines d’une interminable attente, Mini3, qui semblait décidé à profiter au max son séjour in utero, est rentré d’un seul coup dans le vif du sujet. A minuit pile, comme s’il avait attendu d’être sûr de naître le même jour que sa mamie. A minuit pile donc, alors que rien ne le laissait présager, je perds les eaux. Je sonne illico à la sage-femme de garde, Evelyne, qui me dit d’attendre de voir si je vais avoir des contractions. A peine avons-nous raccroché que c’est parti. Une contraction toutes les 2 à 3 minutes. Autant dire qu’avec la poche rompue, j’étais tellement tenaillée par la douleur que je n’ai pu que m’écrouler comme une loque, à quatre pattes sur mon ballon. Impossible de mettre en application les exercices enseignés par Françoise. Au bout d’une heure de ce régime, je me dis que, même s’il ne me paraît pas très charitable de la réveiller encore une fois, ce serait peut-être pas mal de rappeler ma sage-femme, histoire de la tenir au courant. “Ha quand même”, lâche-t-elle quand je lui indique la fréquence des contractions. Un long quart d’heure plus tard, nous nous retrouvons devant la maison de naissance. A partir de là, tout n’est plus que nébuleuse et flou artistique. D’autant plus que je ne suis pas un oiseau de nuit, moi. Le sommeil, c’est sacré. Mini3 a eu tôt fait de me le faire ressentir. Je me souviens avoir attendu à peine quelques minutes qu’Evelyne prépare la chambre. Je me souviens m’être traînée sur le lit. Je me souviens avoir passé pas mal de temps à quatre pattes, appuyée sur le ballon, pour pouvoir balancer sur chaque contraction. Je me souviens avoir geint, gémi, hurlé, pesté, vociféré, éructé une quantité incroyable de mots fleuris et moins fleuris. Il paraît que dire qu’on a mal aide à avoir moins mal. Heureusement. Je me souviens d’un long moment dans la baignoire, couchée sur le côté, à labourer les avant-bras de mon homme. Je me souviens d’Evelyne lui apportant un café alors qu’il piquait du nez, prêt à m’y rejoindre malgré lui. Je me souviens d’avoir usé et abusé de mon écharpe de portage, pour m’étirer au maximum à chaque contraction. Et puis… Et puis le jour a commencé à se lever. J’étais épuisée et je n’avais plus la force de tenir à quatre pattes. Et, surtout, je ne sentais pas ma poussée. Alors, comme les deux autres fois, j’ai fini sur le dos, à mon grand désespoir, moi qui aurais voulu accoucher autrement. Mais, arrivée à un certain stade, la seule façon de mettre fin à la douleur, c’est de le sortir vite fait, ce bébé. Enfin, vite fait… J’ai quand même pris le temps d’une petite sieste. Combien de temps ? Je ne sais pas. Quelques contractions en tout cas. Pendant tout ce temps, Evelyne nous a gratifiés d’une présence discrète. A certains moments elle était avec nous, à me conseiller, à me masser le dos ; à d’autres, au contraire, elle nous a laissés dans notre intimité – je crois. Et puis Agathe est arrivée pour l’épauler. Toutes deux m’ont vraiment facilité la tâche, notamment sur le plan technique, en massant mon périnée, en le recouvrant de compresses chaudes. La douleur est devenue insoutenable, j’ai failli perdre pied, j’avais tellement mal, je ne savais plus quoi faire. Elles m’ont transmis leur calme et leur confiance. Et enfin, au petit matin, mon koala est arrivé, tout tranquille. Un vrai petit marathonien. Après ? Je ne m’en souviens pas beaucoup plus, occupée que j’étais à roucouler et admirer ma progéniture, mon fils, ayayaye, le plus beau des petits garçons du monde. Nous avons bullé sous la couette un certain temps. J’ai pris une douche rapide, avec l’aide d’Evelyne. Elle nous a apporté les croissants, et j’ai pris mon petit déj au lit tout en donnant à mon petit ange sa première tétée. Puis elle nous a commandé un couscous et est partie se reposer chez elle pour ne revenir qu’en fin d’après midi. Nous aurions pu rester sur place encore une nuit, mais j’ai préféré rentrer à la maison le soir même. Mes filles piaffaient d’impatience de voir leur petit frère, et moi d’être là, pour elles, même sans m’en occuper. Les grands parents ont tous déboulé en même temps ; je les ai laissés prendre les rênes de ma maison, et fêter ensemble la naissance de leur petit-fils en même temps que l’anniversaire de ma quasi-maman. La semaine suivante, Agathe est venue me voir chaque jour, nous prodiguant à mon koala et à moi les soins nécessaires, mais aussi apportant son aide précieuse, son écoute, ses conseils. Et, franchement, faire ses premiers pas de maman, accompagnée par une professionnelle, chez soi, c’est inestimable. Un premier bain donné à la maison n’a rien à voir avec celui qu’on donne à la maternité. Par la suite, elle a été disponible pour moi à tout moment, au téléphone, pour me soutenir dans mes débuts d’allaitement très difficiles. Je pense que c’est en grande partie grâce à elle qu’à presque 1 an, mon koala profite toujours du lait de sa maman. De cet accouchement, je garde surtout le souvenir d’un immense calme. La lumière était tamisée, la musique, douce. Nulle précipitation, nulle agitation. Une chambre douillette, des voix posées. Des mains chaudes, rassurantes, apaisantes. Un bébé réellement accueilli.