28 Oct Naissance de Kerian – 28 octobre 2007
Kerian… né comme dans un doux rêve.
Depuis quelques jours déjà je ressens de temps en temps une douleur au ventre la nuit… les fameuses contractions douloureuses, que je n’ai jamais connues de façon naturelle pour la naissance de ton grand frère, Aodren. Dans un demi-sommeil je me rends compte que j’en ai eu quelques unes d’affilées… le moment serait-il venu? Je me force à regarder l’heure: il est 2h… à partir de ce moment là je regarde l’heure à chaque contraction et de fait les contractions sont assez régulières, toutes les 10 minutes environ. Malgré tout je dors entre deux contractions et après une heure et demie à ce rythme je me dis que je dois réveiller ton papa. J’avoue que je n’ai pas envie de le réveiller car je sais que cela va déclencher le branle bas de combat et je ne pourrai plus me reposer entre deux. Finalement vers 4h je le réveille tout doucement. Et voilà que je fais la rencontre de « St Thomas », qui sera le surnom de ton papa tout au long de cet accouchement : « Mais non ma chérie, c’est beaucoup trop tôt, tu n’es qu’à 38 semaines: c’est une fausse alerte. » J’ai beau lui dire que je sais que c’est le bon jour: il ne veut pas me croire. Il m’envoie prendre un bain : « Tu verras après tu n’auras plus rien ». Il est vrai qu’il se base sur notre première expérience d’accouchement, qui j’ai beau le lui répéter, est incomparable dans la mesure où la surmédicalisation y a commencé à 7 mois de grossesse avec la prise d’hormones alors qu’ici on a laissé faire la nature et les contractions dès 6 mois et demi de grossesse. Mais revenons à cette nuit magique. Après 20 minutes de bain les contractions se sont accélérées et viennent toutes les 5 minutes. Vers 5h je téléphone à tes grands-parents pour qu’ils viennent garder ton grand frère. Moi je me recouche et là je me dis que je n’y arriverai pas… la douleur est déjà trop forte or on est qu’au tout début du travail. Le projet en maison de naissance sans péri c’est de la folie… je ne pourrai pas supporter la douleur. Pourtant entre les contractions j’arrive encore à somnoler. Pendant ce temps-là ton papa termine de faire les sacs qui n’étaient pas encore tout à fait bouclés. Quand il a fini il se couche derrière moi, une chaleur réconfortante dans le dos… et c’est là que je trouve notre bulle. Pour expirer lentement (ce que je fais à chaque contraction depuis le début) on m’avait donné des images telles qu’une flamme à éteindre tout doucement, la mer etc, mais rien ne marchait. Notre bulle je l’ai trouvée quand j’ai trouvé notre image… je souffle tout doucement sur tes petites fesses et t’incite à pousser sur le col pour qu’il s’ouvre encore et encore… A partir de ce moment là on est vraiment lié dans cet accouchement et tout se passe mieux… cette image m’accompagnera à chaque contraction jusqu’à ta naissance. Vers 6h je me lève, je m’habille, je m’installe sur le ballon et ton papa est enfin d’accord pour que je téléphone à Evelyne pour lui dire que ça fait deux heures que je suis à 4-5 minutes environ. Elle est catastrophée : j’aurais dû appeler plus tôt! Rendez-vous à 6h45 à la maison de naissance. Mes parents arrivent vers 6h30. Entre temps on a réveillé Aodren et on lui a expliqué que tu va enfin venir et que bientôt il pourra te prendre dans ses bras (chose qu’il demande inlassablement depuis des semaines). Et voilà que ton papa veut faire du chocolat chaud pour Aodren. Heureusement, là j’ai été catégorique: il faut partir. Je pense que si là il ne m’avait pas écoutée tu serais probablement né à la maison…
Vers 7h00 on arrive à la maison de naissance. Evelyne nous y attend et regarde où j’en suis et je pense que ni ton papa ni moi on oubliera ce qu’elle nous a dit à ce moment là : « Patricia, tu as déjà bien travaillé… tu es a 8cm ». Les larmes débordent chez moi comme chez ton papa. C’est seulement à ce moment là qu’on a su qu’on ne revivrait pas l’hyper-médicalisation qu’on a subie lors de la naissance d’Aodren et ce n’est qu’à ce moment là que j’ai su avec certitude que oui tu verrais bien le jour comme nous le souhaitions de tout notre cœur ton papa et moi, à la maison de naissance, naturellement. Les émotions allant mieux, je me réinstalle sur le ballon. Entre les contractions ton papa me fait des massages aux huiles essentielles, par contre pendant les contractions je suis avec toi, comme je l’ai été depuis ce moment il y a seulement 2 heures, où j’ai trouvé ma bulle. Et pas question que qui ce soit me touche à ce moment là, j’ai trop besoin d’être avec toi rien qu’avec toi pour t’encourager à parcourir ce si long chemin, tout en me balançant sur le ballon et me pendant à l’écharpe qui est suspendue au plafond au-dessus de ma tête. Les contractions s’intensifient, se tonifient. Vers 8h15 je sens qu’il va falloir que je bouge, car cela stagne. Avant d’avoir pu dire quoi que ce soit, Evelyne me propose de me déplacer sur le tabouret d’accouchement pour regarder où j’en suis. Le mouvement nécessaire pour me déplacer sur le tabouret fait qu’il est inutile de regarder où j’en suis, j’ai envie de pousser… non je dois pousser… ce n’est plus moi qui décide c’est mon corps qui me dis de pousser et je pousse … une première fois pour rompre la poche des eaux… une deuxième fois pour voir apparaître ta tête et là on est entre deux eaux… un temps suspendu où tu es déjà là mais pas encore tout à fait là… je vois ton visage face à moi pendant qu’Evelyne enlève le cordon qui s’était mis autour de ton cou… avant la troisième poussée qui te fera naître si vite qu’Evelyne arrive tout juste à te rattraper. Il est 8h43. Tu es là, sur moi. Tout les trois, toi, moi et ton papa avons réussi cette naissance « comme dans un doux rêve », rêve que je n’avais pas osé faire avant la naissance de peur qu’il ne puisse se réaliser… de peur d’atterrir à l’hôpital malgré tout… rêve qui s’est réalisé…
Avant de boucler ce récit d’une nuit magique je tiens à remercier plusieurs personnes.
Avant tout merci à ton papa pour sa présence cette nuit-là, mais surtout pour avoir cru en moi et en mes capacités à te mettre au monde naturellement. Sans lui je n’aurais jamais réussi. Merci!
Je veux également remercier la maison de naissance et les sages-femmes qui y travaillent d’offrir aux parents qui le souhaitent la possibilité de vivre un tel accouchement. Avec un merci particulier à Evelyne et Catherine qui nous ont accompagnés cette nuit-là!
Par ailleurs je tiens aussi à remercier les filles d’un forum pas comme les autres car c’est grâce à elles que j’ai appris qu’il y avait moyen d’accoucher autrement, que l’hôpital n’était pas indispensable et que des alternatives existent. Merci à toutes !